EP28 ACTU SANTE LA GREVE DES MEDECINS GENERALISTES

Actu Sante : La grève des Médecins Généralistes

Actu Santé : La grève des médecins généralistes
Actu Santé : La grève des médecins généralistes

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Sound Design: Musique Jungle

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Sébastien : Bonjour et bienvenue dans le podcast Santé et sécurité. Cette semaine, un épisode actu pour revenir sur la grève des médecins généralistes. J’ai trouvé que cette grève était plutôt mal représentée dans les médias, si bien que dans l’opinion publique, la seule chose qui en ressort, c’est que les médecins font grève pour doubler leur revenu en demandant une augmentation du prix de leur consultation de 25 à 50 euros. C’est bien évidemment très réducteur. Et si les médecins font grève aujourd’hui, c’est surtout pour manifester leur mécontentement et leur lassitude vis à vis de la gestion des problématiques actuelles de notre système de santé par notre gouvernement, aussi complexe soit il. Selon La CARMF, la caisse de retraite des médecins, 36 % d’entre eux ont aujourd’hui plus de 60 ans et 20 % ont plus de 65 ans. Une étude de 2022 de l’Association nationale des étudiants en médecine en France a montré que un étudiant sur deux questionnait son choix d’orientation en médecine générale. Sans compter le nombre de médecins généralistes qui des plaques comme ils disent dans leur jargon, c’est à dire qui arrêtent leur activité tant leurs conditions de travail sont de plus en plus difficiles ou suite à un burn out. Je vais spoiler un de nos prochains sujets, mais en 2023, on glissera notre micro dans la poche de trois médecins généralistes sur trois territoires différents et nous les suivrons pendant plusieurs mois afin de renseigner un documentaire sonore sur la qualité de vie au travail de cette profession. Bref, j’ai souhaité faire cet épisode actu pour aborder le sujet de la grève des médecins généralistes sous un autre prisme que celui de la consultation à 50 €. Et pour cela, je reçois aujourd’hui le docteur Céline Berthier. Elle est médecin généraliste en Gironde. Céline est aussi membre active du collectif No Fake Med qui lutte contre la désinformation en santé. Alors on n’aura pas le temps d’aborder toutes les revendications et toutes les problématiques soulevées par les médecins généralistes. Ça serait beaucoup trop exhaustif. Mais nous allons surtout aborder avec Céline la manière dont les médecins pourraient, ne serait ce que déjà, optimiser leur temps de consultation pour des consultations de meilleure qualité et pour, in fine, redonner du temps de consultation aux patients qui en ont vraiment besoin, puisqu’il s’agit là finalement d’une de leurs revendications principales. Je vous souhaite une bonne écoute.

00:02:16

Sound Design: Musique Jungle Fin

00:02:20

Sébastien : Bonjour Céline, Alors pour commencer, est ce que tu peux nous dire quels sont les horaires d’un médecin généraliste à temps plein entre guillemets et comment est organisée la journée d’un médecin généraliste? Combien de patients vous voyez par jour, et cetera.

00:02:33

Céline : Bonjour Sébastien, Alors donc la journée type, c’est très variable puisque on est libéraux, donc vraiment indépendants. Chaque médecin s’organise comme il veut, mais grosso modo, il y a quand même des des patterns qui reviennent. Moi personnellement, je commence mes consultations à 9 h, je finis vers 13 h à peu près, je reprends à 14 h et en général je finis vers 19 h. C’est assez classique et donc ça nous fait du 9 h par jour si on travaille cinq jours par semaine. Voilà, on est, on est à 45 h par semaine assez assez facilement. Donc il y a beaucoup de médecins qui font des gardes en plus. Moi j’ai de la chance d’être dans un secteur où y a pas de gardes parce qu’on a SOS Médecin qui assure la permanence des soins non programmés. On fait quelques gardes en plus sur le volontariat, mais ça va être quelques week ends par an. C’est pas c’est pas énorme, mais dans les secteurs où la ou où il n’y a pas de système de soins libéraux privés, ce sont les médecins généralistes qui les font. Donc ils ont des gardes de 20 h à 0 h et les week end de 8 h à 0 h, les samedis enfin le dimanche de 8 h à 0 h et le samedi de 12 h à minuit. Pour le nombre de patients par jour. Donc ça, ça dépend. C’est très variable en fait, ça dépend de combien de temps on met par patient, c’est logique. Donc moi je mets des consultations de 20 minutes. Donc ça m’amène à une vingtaine de patients par jour, 20 à 25 patients par jour. Mais initialement, la Sécu avait prévu des créneaux de quinze minutes. Donc les médecins qui sont à quinze minutes montent facilement à 30 35 patients par jour. Il y a aussi les visites à domicile à organiser. Donc ça, moi je bloque une demi journée de temps en temps pour aller voir les patients qui ne peuvent pas se déplacer. Et à côté de ça, dans la journée type, faut rajouter l’administratif dans tout ce qui ne peut pas se faire en présence du patient, qu’on cale un peu comme on peut entre nos consultations ou sur des horaires dédiés selon selon l’organisation de chacun.

00:04:38

Sébastien : Ok, je sais aussi que certains de tes confrères, peut être que toi tu l’es aussi, accueillent des étudiants dans leur cabinet. Ça aussi ça prend du temps. Certains vont même donner des cours à la fac. Il y a aussi votre temps de formation continue. Tu en as pas parlé de ça. Ca représente beaucoup de temps?

00:04:57

Céline: Oui, oui, c’est vrai. En fait, ça, c’est vraiment la journée type qu’on essaye de maintenir tout le temps pour pour voir les patients et et parce que c’est ça qui est qui est rémunéré. Mais c’est vrai qu’ensuite il faut rajouter donc la formation continue. Donc ça va être soit avec des groupes de pairs. Donc souvent ça se fait le soir, soit des des congrès qui vont, qui peuvent déborder sur les week ends et et ensuite l’accueil des étudiants. Donc on essaye de le généraliser parce que, en fait, on tient à ce que les étudiants en médecine générale soient formés en ville, voit ce que c’est la médecine de ville et pas que, et pas que l’hôpital et et c’est vrai que ça c’est, c’est chronophage et c’est pas du tout, c’est extrêmement peu rémunéré, c’est juste. Voilà, c’est ça correspond un désir de transmission qu’on a quoi.

00:05:44

Sébastien : Ok, merci de ta réponse. Alors pour revenir à notre sujet, les médecins généralistes ne veulent pas qu’on leur enlève du temps médical, mais plutôt qu’on leur enlève du temps administratif pour augmenter justement leur temps médical. Ça c’est une de leurs de vos revendications pour cette grève. Est ce que tu peux nous expliquer concrètement qu’est ce que, enfin qu’est ce que…. Quelle est la charge administrative d’un médecin généraliste?

00:06:08

Céline: Alors euh, donc moi, la première charge qui me vient en tête, c’est tout ce qui concerne du secrétariat en fait. Donc moi je suis installé toute seule, donc je ne peux pas financer une secrétaire dans mon salaire quoi. C’est juste, c’est pas possible. Alors après c’est un choix de s’installer seul, On peut décider de se regrouper, financer à plusieurs tout ça. Mais c’est vrai qu’il y a encore beaucoup de médecins qui fonctionnaient comme ça. Et pour avoir pour avoir été en groupe, finalement cet exercice me moi me convient bien. Le donc en secrétariat il y a passer la carte vitale des gens, donc gérer quand ça ne marche pas, quand ça bug, quand les quand c’est pas à jour tout ça, encaisser les paiements. Donc ça sur sur une consultation de 20 minutes, j’ai facilement cinq minutes. En fait, j’ai deux minutes au départ, trois minutes à la fin. C’est un peu idiot, mais si on enlève cinq minutes par consultations, ça libèrerait quand même du temps. Il y a tout ce qui va être s’occuper des courriers reçus par les spécialistes en fait. Donc il y en a qui nous écrivent encore en papier. Donc il faut scanner les courriers, le mettre dans les dossiers. Quand ça nous arrive par mail. En ce moment on a beaucoup de doublons parce qu’on… on a les… en fait, on nous crée des adresses mail un peu partout et nous on doit s’occuper de collecter tout ça et le mettre dans les dossiers. Donc ça, c’est tout ce qui va être du secrétariat. On a aussi tout ce qui est certificat. Donc ça, je pense que les patients, on du en entendre parler, on en parle beaucoup. Mais c’est vrai qu’au sein de notre consultation, il y a beaucoup de. Donc ça, ça c’est du temps en présence du patient, mais en fait c’est du temps qui pourra être libéré, donc ça va être faire tous les papiers pour certifier, donc les arrêts de travail, les arrêts pour jour, enfants malades, les arrêts pour justifier qu’on n’a pas mis son enfant à la crèche. Parce que voilà, la crèche ne crois pas les parents sur parole quand l’enfant manque la crèche, voilà, ça fait beaucoup de papiers qui ne sont pas en fait du temps qu’on passe à soigner et qui à notre idée pour être fait sans le, sans le médecin en fait. On sert de témoins de bonne foi et c’est pas c’est pas le rôle, c’est pas un rôle. On aimerait qu’on nous décharge de ce rôle la quoi. Dans l’administratif, il y a aussi les prises de sang. Donc je parlais des courriers tout à l’heure, mais en fait quand on prescrit une prise de sang autrefois et la médecine générale était fait comme ça, il n’y avait pas de mail. Les gens, quand ils avaient leur prise de sang et revenaient voir le médecin avec le résultat et donc ça faisait l’objet d’une consultation, on regardait ensemble. Voilà, maintenant on reçoit par mail, donc on est censé la voir, avoir vu les prises de sang dès qu’elles nous ont été transmises, le laboratoire est déchargé de sa responsabilité. Donc on doit regarder les biologies et tout ça. Le patient n’est plus là. Donc en fait ça va être du temps qu’on fait soit le soir, soit entre deux. Voilà. Mais c’est une charge de travail qui est quand même non négligeable. Un peu comme les courriers d’ailleurs, comme les mails. Il y a aussi répondre aux messages des patients en fait, qui veulent nous joindre. Donc quand on est en consultation, pour beaucoup d’entre nous, on ne répond pas au téléphone pour pouvoir se concentrer sur sur le patient qu’on a en face de nous. Mais pendant ce temps là, les patients continuent de nous joindre. Donc soit ils nous laissent des messages par les secrétariats, soit ils nous laissent des secrétariats téléphonique, soit ils nous laissent des mails selon comment on est organisé et tout ça. Après, il faut gérer les demandes des gens, voir si c’est urgent, pas urgent, voire comment est ce qu’on répond à chacun. Et donc voilà, ça c’est aussi un petit peu du temps, ce qu’on appelle administratif, parce que ce n’est pas du temps à proprement parler à soigner. Ce qui est, ce qui est du boulot du médecin, il y a en fait, moi, je voir les prises de sang, évidemment qu’on ne peut pas le donner à quelqu’un d’autre qu’à un médecin. Donc moi, ça, ça ne me choque pas. Ce qu’on voudrait, c’est qu’effectivement il y soit reconnu dans notre travail pour pas pour pas dégoûter les médecins, les futurs médecins généralistes, parce qu’en fait il y a beaucoup de gens qui se détournent du métier justement parce que parce que cette charge de travail à elle et pas elle est pas reconnue.

00:09:49

Sébastien : Est ce que vous vous êtes amusé à le quantifier, à la quantifier, cette charge de travail en termes d’heures à la semaine? Est ce que tu as une idée de pour être concret, de combien de temps ça représenterait?

00:09:59

Céline: Moi quand j’ai réfléchi à ça, je dirais les biologies, les courriers, c’est 30 minutes par jour, donc ça nous fait 2 h voilà 2 h… 30 minutes par jour ça me semble, ça me semble parlant et je pense que c’est au bas mot quand on interroge un peu les autres, les autres médecins, il y en a qui ont facilement 1 h le soir après le départ des patients de travail à gérer, sans compter ce qu’on fait entre 12 h et deux. Tout à l’heure, je t’ai parlé d’une pause d’une heure. Il y a beaucoup de généralistes qui continuent de travailler pendant, qui mangent le midi . Bon voilà, si c’est vrai que si. Enfin voilà, c’est pas si c’est non négligeable. Et ensuite sur les certificats, ça, ce qui est sûr, c’est qu’il y a beaucoup de consultations qui pourraient être évitées s’il n’y avait pas ces certificats.

00:10:42

Sébastien : Oui, c’est ça, parce que, en fait, la problématique aussi, c’est les services d’urgence et notre système de santé, et donc les services d’urgence qui sont débordés et on peut même dire saturés. Il semblerait que le passage aux urgences, ce serait 90 % de médecine générale. Et du coup voilà, les médecins généralistes disent qu’il y aurait du temps à gagner. Effectivement, tu en a parlé en travaillant sur plusieurs points comme les consultations non honorées, les certificats médicaux. Pas forcément inutile, mais en tout cas parfois qui le sont si on peut le dire je pense. Les problématiques des visites à domicile aussi, et puis l’éducation à la population. Alors du coup, si tu veux, tu voulais parler des de ces problématiques de certificats médicaux. J’ai lu que les syndicats souhaitaient mettre en place une auto déclaration par les patients pour les arrêts de moins de trois jours comme ce qui avait été fait pour le covid. Tu as parlé des certificats enfants malades donc que les employeurs demandent systématiquement pour justifier la fameuse journée enfant malade ou que demandent les écoles aussi pour le remboursement de la cantine. Voilà. Et en effet, ces demandes de certificats participeraient énormément à l’occlusion du système et si elles étaient libérées permettraient donc, de ce que je comprends, de rendre des créneaux de consultations à des patients qui en auraient plus besoin. Du coup, est ce que tu peux nous parler de ces problématiques?

00:12:12

Céline : Ouais. C’est ça. Ça c’est ça. C’est complètement vrai. C’est à dire que moi j’ai vraiment au moins, je dirais deux ou trois par jour patients qui viennent parce qu’ils n’ont pas pu aller travailler, qu’ils ont besoin d’un mot pour leur employeur, ils savent qu’ils vont, ils sont pas inquiets, ils savent que je ne leur prescrira pas de médicaments sur des maladies bénignes qui passent toute seule, mais ils viennent pour ça, donc c’est On a beau faire. Voilà, on parlait de l’éducation des patients. En fait, ça c’est vraiment pour moi les médecins qui sont responsables de ça. C’est à dire que moi, dans dans les patients que je suis quelqu’un qui vient pour une rhinopharyngite, il y a aucun traitement quoi. Alors je sais, c’est je l’explique bien et puis après ils le savent et tout ça et on est tout à fait d’accord sur ça. Ils demandent pas des antibiotiques, ils ne demandent pas des traitements, des spray pour le nez, des trucs comme ça. Je leur explique le lavage du nez, c’est le c’est, c’est ce qui est le mieux actuellement, qui a le moins de risques et qui est le plus efficace. Voilà, ça, ça, le problème, ce sont les médecins eux mêmes qui prescrivent en se disant oui mais si le patient il vient et qui repart sans rien, il va avoir l’impression d’être venu pour rien. Non, en fait, quand quand on rassure, quand on explique d’ailleurs, on a fait, on a fait notre boulot, donc c’est hérité à la fois un peu de d’il y a, des médecins un peu ancienne génération qui mettait beaucoup de traitement, un petit peu, qui enfin voilà qui était promu par l’industrie pharmaceutique, tout ça et et qui maintenant sont en désuétude. Mais même aussi chez des médecins actuels qui qui ont du mal à ne rien prescrire. Donc en fait, quand on a acquis ça, de ne pas prescrire de choses pour les maladies qui passent toutes seules, eh bien il reste des patients qui viennent pour pour les certificats. Et, et, en plus, ce qui est vraiment idiot, c’est que c’est que pour ces petites maladies, c’est que du déclaratif. Quelqu un qui me dit j’ai eu la diarrhée toute la nuit, je vais pas aller voir chez lui chez lui, il a bien fait caca mou ou quoi. Je le crois. Bon voilà, c’est pareil, c’est pareil pour. C’est pareil pour le pour la grippe. Quelqu’un qui a pris du paracétamol avant de venir, il aura plus de fièvre quand il vient l’examen clinique est normal. Mais mais je le crois. Et en fait là aussi la difficulté c’est qu’actuellement il faudrait impliquer les employeurs, les entreprises pour qu’ils mettent en place une relation de confiance avec leurs avec leurs employés, comme ça, pour qu’on soit plus là en tant que témoin de moralité, ce qui n’est pas, ce qui n’est pas notre, ce qui est pas notre rôle quoi. On a même pas nous les éléments, on croit les gens quoi. Et et d’ailleurs les employeurs, ne s’y trompent pas, ils, quand ils voient des arrêts de travail, ils soupçonnent tout de suite les médecins d’être de complaisance. Tout ça parce que parce qu’en fait, nous on croit les gens, c’est notre boulot, on est le on est le médecin des patients. Donc donc voilà quelqu’un qui nous dit qu’il ne va pas bien, on ne va pas, on ne va pas mettre sa parole en doute, mais clairement notre certificat du coup il a pas. Enfin il sert juste à faire un papier quoi. Il a plus de valeur, ni dans un sens ni dans l’autre. Et. Et ce serait à l’employeur de mettre d’une part une relation de confiance et d’une part des conditions de travail où les gens ils ont pas envie de s’arrêter dès qu’ils peuvent, parce qu’en fait ce serait enfin ça devrait être un. Enfin voilà épanouissant ou au moins gratifiante de travailler et que ce n’est pas le cas quoi.

00:15:28

Sébastien : Et puis ça permettrait de réduire aussi les coûts parce que finalement, ça coûte à chaque fois une consultation.

00:15:33

Céline : Ah ben ça j’en parle pas. Je me souviens d’une d’une maman qui était venue me voir pour, elle avait besoin d’un certificat pour la cantine parce que les cantines dans les mairies comme les gens s’engagent à mettre leurs enfants à la cantine, mais qu’ensuite il faut régler la cantine, dès qu’ils peuvent, ils ne le mettaient, ils le mettaient pas en disant ben j’ai pas, il a pas mangé tel repas, tel repas, tel repas. Donc en fait les cantines se retrouvaient avec des déficits. Voilà, ils avaient commandé trop, ils étaient pas assez rémunérés. Donc maintenant quand on met pas son enfant à la cantine, il faut un certificat et. Et donc j’ai une maman qui était venue pour, pour pareil, un enfant, elle savait très bien ce qu’il avait, elle était pas inquiète pour le certificat, pour la cantine, la cantine. Je lui ai demandé le repas, c’était 2,30 €. Donc en fait la consultation c’était 30 €. Et bien voilà, elle faisait payer 30 € à la société pour pas régler 2,30 € de cantine quoi. Et et ça c’est encore une relation de confiance qui s’établit et où enfin voilà, on nous met au milieu de ça et on n’a pas grand chose à y voir quoi.

00:16:33

Sébastien : Ok, dans vos revendications, vous vous parlez aussi des consultations non honorées. Récemment, moi je suis allée chez mon médecin généraliste et dans la salle d’attente, il y avait une affiche sur laquelle était inscrit que depuis le 1ᵉʳ janvier 2022 140 patients, on n’avait pas honoré leurs rendez vous. Alors c’est certain que si ces chiffres sont identiques pour tous les médecins, bien évidemment, ça fait un nombre de consultations perdues, très importantes au préjudice d’autres patients qui, pour le coup, eux, n’ont peut être pas pu avoir de rendez vous. Est ce que tu peux réagir sur ce constat?

00:17:05

Céline : Alors en fait, moi je trouve qu’en tant que généraliste, on est un peu moins touchés parce que les gens nous connaissent bien. Après, enfin, la politesse s’installe, on connaît toute la famille. Si si, quelqu’un nous fait, nous fait ce coup là entre guillemets trop souvent. Enfin voilà, on va, on va réagir. Voilà. Bon, j’ai pas trop ce problème. Quand quelqu’un peut pas venir souvent, je sais que c’est qu’il a une, c’est qu’il a une bonne raison. Donc je je je me prends pas la tête avec ça. Ça concerne beaucoup plus les premiers rendez vous. Donc moi depuis quelques mois je suis sur Doctolib et tous les gens qui viennent pas sont des gens que je connais pas en fait qui prennent rendez vous comme ça en ligne et et qui en fait doivent certainement prendre aussi d’autres et vont au premier disponible. Donc ça, c’est sûr que c’est vraiment. C’est vraiment agaçant. Les spécialistes sont beaucoup concernés par ça, parce que c’est pareil, les spécialistes, eux, les gens les connaissent pas, donc en fait ils prennent… enfin voilà, ils s’en fichent de pas honorer le rendez vous, c’est pas quelqu’un qui reverront tout ça. Donc c’est beaucoup. Je trouve que les spécialistes sont très très concernés par ça. Une des solutions, ce serait peut être de faire régler des consultations à l’avance, bon. Le problème c’est que par la sécurité sociale, on a pas le droit de faire ça. On a le bras de faire régler qui en actes qui a été réellement effectué. J’ai pas de solution à ça. Pour l’instant, nous on est tellement débordés que honnêtement, quand un patient vient pas, ça me laisse le temps de justement voir les biologies et tout ça. Ça… je, je ne me prends pas la tête avec ça. Mais voilà, je sais qu’il y en a qui deviennent un peu un peu fous avec ça et je le comprends.

00:18:41

Sébastien : Ok, on pourrait parler aussi du nombre de consultations prises importantes pour les certificats d’aptitude à la pratique d’activités sportives, parce qu’on entend en général c’est les mois de septembre, les médecins se plaindre qu’ils passent leur mois de septembre à rédiger des des certificats de sport alors même que ils ne sont plus obligatoires pour les enfants et qu’ils sont valables trois ans je crois maintenant pour les adultes. Tu peux nous en parler?

00:19:06

Céline : Oui alors en fait moi ce que je constatais beaucoup, donc les enfants, il était grosso modo recommandé de les voir une fois par an. Donc en fait c’est juste que du coup c’était mal réparti en fait, c’est à dire que les gens venaient pour la consultation de suivi de l’enfant tous au mois de septembre et à la fin de la consultation on faisait le certificat pour le sport. Voilà, c’était jamais des consultations inutiles. Moi j’ai jamais trouvé, enfin d’ailleurs c’était sensé quand les gens venaient vraiment que pour ça, alors qu’on avait vu la personne avant, bien de façon complète, exhaustive et tout ça, normalement on ne doit pas faire rembourser la consultation. En vrai, moi c’est toujours des consultations qui finalement au niveau médical étaient intéressantes. On regarde, si il n’y a pas de scoliose, on règle, on vérifie la croissance, on refait un point sur sur l’hygiène de vie. Voilà, donc c’était des consultations de prévention. Le problème c’est que ça ne touchait pas le bon public. C’est à dire que les gens qui viennent faire ces consultations pour le sport ou de prévention sont déjà des gens qui font attention à leur santé et et qui ont les moyens de se payer un club de sport. Donc en fait, c’était pas une une façon intéressante de de diminuer les inégalités en santé. Donc voilà, c’est très bien que ça disparaisse et effectivement, ça ne servait d’un point de vue médicale strictement à rien. C’est à dire que il y a très peu de contre indication médicale à la pratique du sport, même les enfants qui ont des pathologies cardiaques, les grands asthmatiques et enfin ou les pathologies locomotrice ne sont pas des contre indications et au contraire il faut, il faut faire du sport tant qu’on peut et comme on peut. Donc donc clairement au niveau médical, c’était un peu idiot. Et l’autre chose qu’on sait, c’est par exemple des grands sportifs qui sont très très très suivis n’empêche pas d’avoir des morts subites sur le terrain de foot devant les caméras de TV. Enfin voilà, ce n’est pas en fait, les vrais accidents graves sont assez difficilement prédictibles. Donc être se faire suivre, oui, avoir une bonne hygiène de vie, oui. Faire un certificat pour le sport tous les ans, non, clairement c’était idiot et et en plus on a du mal à s’en débarrasser. Parce qu’en fait, autant les grandes fédérations suivent la loi et ne demandent maintenant plus qu’un certificat tous les trois ans et tout autant, les petits clubs toujours pareil veulent se protéger et veulent quelqu’un qui va mettre un tampon et une signature. Et. Et donc là, le plus de certificat que je rédige actuellement, c’est la gymnastique volontaire de la mairie de… Voilà, d’un petit village où il y a beaucoup de personnes âgées. Voilà. Et c’est… Et ça c’est vrai que c’est un peu. C’est un petit peu casse pied. Ceci dit, les gens sont pareils, ils ne viennent pas que pour ça en fait. Ils viennent, ils attendent un renouvellement de traitement et voilà. Et donc ce n’est jamais en clair, ce n’est jamais des consultations inutiles, mais ça nous fait faire, nous, un papier en plus à la fin de la consultation et ça nous rajoute encore un peu de un peu de fin de paperasse administrative qui n’est pas du soin quoi.

00:22:07

Sébastien : Ok. Abordons maintenant les visites à domicile. Alors moi, est ce que ce que j’ai compris, c’est que les patients sont plutôt demandeurs de ces visites à domicile? Sauf qu’une visite à domicile, c’est entre 45 minutes et 1 h en général pour un médecin. Corriges moi si je me trompe et que donc pour un patient vu à domicile de ce que tu nous a expliqué, ça veut dire vous en voyez peut être trois au cabinet et que du coup, là encore, agir sur ce levier, ça permettrait de vous libérer du temps et de voir plus de patients. Mais à la fois il y a quand même certains patients qui ne peuvent pas faire autrement que de bénéficier de ces visites à domicile. Donc du coup, où est la solution pour pour cette problématique?

00:22:53

Céline : Alors en fait, il y a deux types de visites qui sont très différentes les unes des autres. Il y a les visites en urgence et les visites programmées, les visites en urgence clairement c’est… en fait… Donc nous au cabinet, on ne peut pas les assurer parce qu’on fixe des rendez vous à l’avance aux patients. Donc en fait on est au cabinet, donc on a, voilà tout notre planning qui est plein. On ne peut pas quitter le cabinet pour aller pour aller quelques rues plus loin, voir voir l’urgence du départ du patient. L’autre chose, c’est que en fait, les urgences réellement graves, on ne peut pas sortir de chez soi. Ce sont des urgences où il va falloir une prise de sang. Il va falloir une radio va, il y aura une prise en charge derrière. C’est pas nous, généralistes, avec nos petites mains et notre sacoche où on va sauver la vie du patient, voire même au contraire, souvent c’est une perte de chance. Il vaut mieux aller le plus vite possible à l’hôpital appeler le 15. Donc pour moi, vraiment, à mon sens, les vraies urgences, le généraliste, c’est qu’une…. Enfin voilà, ça doit pas faire partie de notre de notre prise en charge. Après il y a beaucoup de d’urgences qui sont en fait, alors c’est un peu péjoratif de dire ça, mais c’est du confort. C’est à dire c’est quelqu’un qui a 39 de fièvre et qui se sent pas capable de sortir chez de chez lui. Bien en fait on prend un doliprane, on attend un peu, on prend une douche et puis en fait 2 ou 3 h après ça va mieux quoi. Donc il y a beaucoup. Enfin voilà, il y a beaucoup de consultations que j’ai fait autrefois. Ça fait quinze ans que je suis généraliste. Il y a encore quinze ans, on faisait des visites à domicile pour grippe. On ne peut plus voir les gens à domicile pour grippe, c’est pas possible, on est pas assez nombreux et en plus à mon sens, on fait de la moins bonne médecine au domicile des gens. On n’a pas notre ordinateur, on n’a pas nos, on n’a pas nos outils, il y a une moins bonne lumière, les gens, on n’a pas nos tables d’examen. Enfin voilà, c’est pas, c’est quelque chose qui est amené à disparaître. Mais c’est vrai que les gens y étaient très attachés. C’était presque un signe. J’étais tellement malade que j’ai dû faire venir le médecin quoi. C’était vraiment. Ah, il m’est arrivé quelque chose de grave, je vous assure. C’était assez. C’était assez. Assez terrible. Enfin voilà, c’était un peu déprimant quoi. Donc il y a ça. Et donc ça, je pense, c’est pour le volet urgence qui a évolué. Alors ensuite il y a pour les pathologies chroniques, donc les gens grabataires. Donc en fait, moi j’assure les visites à domicile pour les gens grabataires, c’est à dire que les gens qui restent en position couchée en bas, il y a des gens qui ne peuvent plus, qui ne peuvent pas se lever, soit parce qu’ils sont en fin de vie, soit parce qu’ils ont des pathologies très importantes qui font qu’ils sont alités. Pour tout le reste. Et bah en fait, mon opinion à moi, mon avis, c’est qu’il faut solliciter les familles en fait, et ça c’est assez, c’est assez terrible mais et en fait nous on peut plus se déplacer pour tous les gens qui pour les personnes âgées qui ne marchent plus, eh bien en fait, elles sont trop nombreuses et on n’est pas assez de généralistes pour aller faire le tour, le tour des des petites fermes ou des maisons. Où sont ces personnes là en fait la. Alors c’est une discussion. Moi ça me dérangerait pas et pareil, j’en ai fait beaucoup. C’était très. C’était très sympa. Il n’y a pas de problème, les personnes âgées étaient ravies de nous accueillir chez elles nous offrait le café, il y a pas de soucis. Mais mais en vrai, dans une contexte de pénurie médicale, ça doit pas être à nous de faire les déplacements. Je pense pas quoi. Donc en fait ça, ça rejoint aussi un problème de société qui est l’isolement des personnes âgées, l’éclatement des familles avec les enfants qui sont pas tout prêts, on est d’accord, mais souvent dans les gens. Moi ce que je constate, c’est que dans les personnes très très âgées, au delà de 80 et 90 ans, leurs enfants eux mêmes sont déjà à la retraite, en fait. Donc, c’est. Voilà, il y a une question de, à qui s’occuper de nos aînés? Est ce que nous, généralistes, on peut prendre en charge ça? Actuellement, pour moi, la réponse est non, pas le. J’ajouterai une dernière chose. En fait, souvent je pose la question quand il va voir le cardiologue ou quand il va voir le cancérologue, comment est ce qu’il y va? Ah ben là il y a une ambulance et puis on l’amène au cabinet. Et ben moi je dis en médecine générale c’est pareil en fait. On a une expertise qui est tout aussi valable et nécessaire que celle du spécialiste donc. Donc en fait, maintenant, je n’hésite plus à prescrire une ambulance pour venir à mon cabinet et il est pas normal que ce soit moins cher de déplacer un médecin que de que de déplacer un taxi quoi en fait. Et actuellement il y a. C’est aussi le grand problème des gardes, on en reviendra. Mais en fait le 15 préfère déplacer un médecin sur 40 kilomètres que d’envoyer un taxi parce que c’est moins cher quoi. Donc voilà, il y a une question de coût du temps médical qui est qui est, qui est vraiment, qui est, qui est pas assez valorisé en France et qui est et qui amène à des situations comme ça quoi.

00:27:52

Sébastien : Et bien merci Céline.

00:27:53

Céline: je t’en prie.

00:27:55

Sébastien : On a évoqué un petit peu déjà tu tu l’as évoqué toi, l’éducation, l’éducation des patients. Donc on est d’accord, c’est le travail du médecin, tu tu l’as dit. Mais effectivement, il semblerait qu’il y ait aussi là du temps à gagner sur l’éducation des patients et des patients qui vont venir consulter pour pour pas grand chose entre guillemets. Qu’est ce qui freine la mise en place aujourd’hui d’une politique d’éducation et de la prévention parce qu’elle semble demandée par tout le monde, mais elle n’est pas mise en place. Pourquoi?

00:28:27

Céline : En fait moi c’est un peu je suis pas trop trop d’accord avec ce enfin comment dire. Alors ce qui est sûr, c’est que les politiques de santé sont pas toujours aidantes. Par exemple sur l’AVC, elles vont dire… elles essayent d’informer les gens, les premiers signees… vous avez la bouche de travers, vous vous n’arrivez plus à parler. C’est parfois mal reçu, voire ça sert à augmenter l’inquiétude. On a des gens qui arrivent qui, pour un symptôme un peu minime, se disent est ce que c’est pas un AVC? Voilà, c’est c’est un peu… moi, ça me semble compliqué. On ne peut pas demander aux gens d’être médecin à la place du médecin. Je vois, là, je ne suis pas fin voilà, c’est quelque chose que je qui moi me parle pas. Par contre, ce que je constate par exemple, c’est alors en fait par l’éclatement des familles, le fait que les gens maintenant ont des familles mono nucléaire ou où ils sont tout seul, les parents sont dans une autre région, il n’y a pas de frères et sœurs, il n’y a personne d’autre. Les gens sont très seuls et et en fait, ce qu’autrefois était réglé un peu par le bon sens ou par la mamie qui avait déjà eu dix enfants qui s’inquiétaient pas quand il y a un petit 38 de fièvre chez l’enfant de trois ans ou où les tantes ou voilà, ça faisait un tissu social qui était autour des parents qui étaient beaucoup plus aidants. Et maintenant je vois des gens, des jeunes parents, je fais beaucoup de pédiatrie, arriver un peu affolés pour certainement des choses pour lesquelles on consultait pas au auparavant. Mais je ne blâme pas les gens pour ça, parce qu’en fait juste qu’ils n’ont pas de solution ou quoi. Et donc ils se tournent, ils se tournent vers le médecin parce que voilà, quand il y a une, il y a une anxiété, il faut bien, il faut bien répondre à cette angoisse, mais aux urgences, c’est pareil, ils ont le même, ils ont le même constat avec des gens qui viennent pour un peu de fièvre ou ou et qui se disent mais mais pourquoi est ce que ces personnes là n’ont pas vu que que c’était pas grave? Je ne sais pas, c’est compliqué. Moi je ne vois pas bien comment est ce qu’on pourrait, quel niveau? Si déjà on apprenait par exemple les gestes de secours à tout le monde, ça me semblerait plus utile que savoir quoi faire en cas de fièvre. Voilà, si je ne sais pas comment dire, c’est ça. Je pense qu’il y a des choses qui sont plus faciles à enseigner que les conduites à tenir en cas de maladie. À part l’expérience, il n’y a pas. C’est sûr, qu’une maman qui a déjà eu trois enfants, clairement elle consultera moins vite que la maman à son premier enfant. Mais de nos jours, c’est deux enfants par femme. La moyenne meme pas c’est peut être 1,7 enfants par femme. Donc on n’a plus cette expérience là et on va avoir plus besoin du médecin. C’est la société dans son ensemble qui est beaucoup plus anxiogène. Et voilà. Et médicalisé aussi que autrefois. Et ça c’est vrai, quand ils ont anti… enfin quand ils ont calculé le nombre de médecins qu’il faudrait pour une population, ça, ça n’a pas du tout été pris en charge. Ce que faisaient les grands mères auprès des enfants, c’était ça n’a pas été pris en charge. Et voilà, c’est un peu nous les généralistes, qui faisons beaucoup de ça maintenant, quoi. Le une autre chose sur laquelle je voulais parler, c’est un peu différent du côté éducation, mais en fait, là où nous on va être efficace auprès de nos patients, c’est parce qu’on les connaît. Donc les gens nous font confiance, donc ils viennent nous voir pour, on va dire, une fièvre. J’examine l’enfant. Je dis ne vous inquiétez pas, il y a aucun signe de foyer infectieux, bactérien, ça veut dire que c’est un virus, Ça va passer dans les quelques jours. Voilà. En fait, si les gens nous font confiance, c’est parce qu’on est le médecin traitant qui nous ont déjà vu par le passé, qui nous reverrons après. Et c’est cette relation là qui a un prix. Et ça, ce pourquoi on fait grève, c’est qu’en fait la Sécu est en train de l’abolir, ça, en fait, c’est à dire que ce qu’elle voudrait, c’est qu’on voit les gens en dix minutes, vraiment qu’on en voit le plus possible puisqu’il n’y a pas assez de médecins, voir faire des gros centres de santé où on serait un petit peu interchangeables parce que c’est sûr que plus on est proche du patient, plus on va l’écouter. Pour moi, s’il y a quelque chose qui est très important parce qu’il y a aussi une grande souffrance, voilà, partout, les gens sont très anxieux. Il y a aussi la souffrance au travail dont on n’a pas parlé, mais qui est un énorme motif d’arrêt de travail. Actuellement, c’est des gens qui sont en burn out, donc le diagnostic un peu à la mode et qui sont tout simplement très, très mal dans leur travail. Et donc ça, nous, c’est parce qu’on est médecins traitants qu’on a qu’on va avoir une empathie, qu’on va pouvoir prendre bien ça en charge, accompagner les gens et tout. Mais c’est sûr qu’avoir son médecin personnel, et bien en fait, ça coûte des sous. Ça implique qu’on soit relativement disponibles. Et en fait, nous on se bat pour essayer de garder ça parce que, en fait, dans les dispensaires où vous verrez jamais le même, même médecin, eh bien pour moi, ça va générer des coûts de santé parce que les gens ont pas confiance et je le vois moi même avec ma patientèle, quand quand la veille, le mercredi, donc moi je ne travaille pas, le mercredi, ils sont allés voir le mercredi un médecin de garde. Eh ben c’est pas rare que le jeudi ou le vendredi ils reviennent me voir parce qu’en fait c’est pas passé et qu’ils n’ont pas eu confiance dans le médecin et qui veulent et qui veulent un deuxième avis. Et en fait pas. Je pense que le concept de médecins traitants c’est quand même important, enfin de se battre pour ça, parce que ça pour moi, ça engendre une médecine de qualité où il y a une relation qui est précieuse et et clairement, si on continue ça, ça va, ça va disparaître parce que de moins en moins de gens veulent être médecins traitants, parce que justement c’est peu rémunérateur par rapport à faire de la téléconsultation ou faire du SOS médecins ou de la Maison médicale de garde. On voit les gens un peu, un peu à la chaîne, le plus vite possible pour en voir le plus possible, et où, et où et où on ne revoit pas les gens après quoi.

00:34:17

Sébastien : Alors Céline, il fallait que j’aborde la problématique des IPA. Les infirmiers en pratique avancée. Alors petit spoiler, on fera prochainement un épisode de podcast dédié aux infirmiers en pratique avancée. Mais est ce que tu peux nous expliquer en attendant très rapidement ce que sont les IPA et pourquoi les médecins redoutent tant que les IPA puissent prescrire? Alors je précise qu’il s’agit d’une des revendications de certains mouvements. Et je dis certains parce que la communauté des médecins généralistes semble plutôt divisée sur ce sujet.

00:34:48

Céline : Oui, complètement. Alors pour moi, c’est un non-sujet. Les infirmiers de pratique avancée, c’est vraiment encore mineur en France. Je crois qu’il y en a une quarantaine qui exercent. C’est vraiment s’emballait pour rien. Il n’y a aucun problème. C’est en fait c’est des infirmiers qui font une qualification supplémentaire. Donc souvent, c’est dans des domaines très précis. Par exemple, ça va être le sevrage, le sevrage tabagique en tabacologie, ça va être des infirmières en psychiatrie qui vont pouvoir faire du suivi un petit peu plus poussées. Ça peut être en diabétologie, mais ça reste sur des domaines assez ciblés. Donc en aucun cas ce sera des des médecins généralistes light. Donc pour moi c’est vraiment se faire. Voilà, beaucoup de bruit pour rien, c’est et c’est super que les infirmiers puissent monter en spécialisation en compétences s’ils le souhaitent. Moi je les encourage, je pense que pour eux ça sera super super intéressant. Pour les patients, c’est tout bénef aussi parce que ça ne veut pas dire qu’ils auront plus de médecins traitants à côté, mais ils auront le double discours du médecin traitant et de l’infirmier. Donc c’est toujours intéressant de varier les points de vue et et ensuite, d’une manière générale, ça augmente l’offre en soins primaires. Et en fait, ce qu’on sait, c’est que plus les soins primaires sont forts dans un pays, plus l’état de santé de la population est bon. C’est à dire que plus on est en premiers recours à pouvoir répondre, à être proche des gens, plus on va pouvoir dépister les maladies tôt, les soigner mieux il vaut mieux avoir un bon réseau de soins primaires que des spécialistes ultra pointus voila qui sont bien effectivement dans les dans les colloques scientifiques. Mais mais en vrai, ce qui fait la différence sur l’état de santé des populations, c’est les soins primaires quoi. Donc bienvenue aux infirmiers de pratiques avancées, on les espère nombreux à nos côtés, mais effectivement c’est pas le discours. Enfin voilà, parce qu’ils vont être ils vont être rémunérés, ce qui est tout à fait normal. Et. Et c’est vrai que certains généralistes sont tellement un peu écœurés du métier que ça les je pense que ça les ça les stresse de voir partir ça, cette partie du travail. Après ce qui qui est une réalité, c’est que si les consultations on va dire relativement simple, par exemple le diabète bien équilibré, l’hypertension bien équilibrée sont prises en charge maintenant par les infirmiers, il va nous rester à nous que les consultations complexes. Et donc c’est vrai que, avec un tarif à 25 €, une consultation complexe, c’est un peu. Voilà, ça peut. Ça peut en agacer certains. Et en vrai, voilà, ça ne va pas. Ça ne va pas nous menacer directement quoi. Donc voilà, pour moi c’est un pour moi, c’est un non sujet.

00:37:47

Sébastien : Ok, très bien, merci. Merci encore Céline. Allez, dernière question, je ne vais pas revenir sur le passage de la consultation à 50 €. On l’a entendu et entendu. Cependant, je voulais revenir sur la tarification de vos actes, vos actes. Pardon, parce qu’on n’y comprend pas grand chose, nous le grand public. Alors moi, si j’ai bien compris, lors d’une consultation, vous facturez le tarif de la consultation de base mais aussi les actes que vous pourriez réaliser, les actes médicaux que vous pourriez réaliser. Et le problème, c’est que peu d’actes associés ensemble peuvent être facturés aux patients. Et quand c’est le cas, de ce que j’ai compris, tu me corriges encore une fois, c’est que si vous réalisez par exemple trois actes, le premier sera facturé au patient à 100 %, le deuxième ne le sera qu’à 50 % et le troisième, le quatrième, le cinquième plus s’il y en a, seront réalisés gratuitement. Et donc les médecins demandent la réforme de ce système. Est ce que tu peux nous expliquer, à nous qui n’y comprenons rien, comment fonctionne la tarification du médecin généraliste?

00:38:47

Céline : Donc oui, c’est ça, tu as raison, on facture les actes selon un mode dégressif. Après en médecine générale, le la grosse majorité de notre acte c’est diagnostics et et consultations simples. Et en fait, là où un problème se pose, c’est que on n’a pas le droit de coter plusieurs motifs sur une consultation. C’est à dire que moi le grand classique c’est et c’est vraiment du quotidien. Quand c’est quelqu’un qui vient donc un monsieur diabétique, il a de l’hypertension qui prend un traitement pour dormir. Depuis des années il vient pour le renouvellement de ses médicaments. Et puis en fait il a mal à la jambe depuis un mois donc il voudrait bien savoir. Il voudrait bien que je regarde. Et puis au fait, il a mal à la gorge depuis hier. Donc tant qu’il est là, est ce que je peux regarder? Et en fait ça, on ne peut pas actuellement le le côté, le facturer. En fait, on va faire trois actes diagnostics, c’est à dire pas un renouvellement. Alors, sans parler des trois pathologies différentes le diabète, l’hypertension, les troubles du sommeil. Ça déjà il y aurait trois pathologies, mais ça dans le renouvellement, on en factura qu’une, c’est comme ça depuis toujours. Mais par contre on ne peut pas facturer le diagnostic sur la jambe et on ne peut pas facturer le mal de gorge en fait. Alors déjà, c’est compliqué parce que pour organiser la journée, ben on prévoit un rendez vous de 20 minutes. Et donc en fait, si tout le monde fait ça, ben forcément, ça va durer plus que 20 minutes et je peux vous assurer que tout le monde fait ça. Et ensuite, donc, il y a une question de reconnaissance de l’acte intellectuel, de diagnostic et de et de traitement. En fait. Pourquoi c’est comme ça? Parce qu’autrefois la médecine là aussi, et la médecine générale, en 80 ans, lors de la création de la Sécurité sociale, elle a complètement évolué. C’est à dire que maintenant, il y a beaucoup plus de pathologies chroniques. Les gens vivent plus longtemps. Il cumule les pathologies, donc les médicaments. Et donc quand on prescrit un médicament doit on doit toujours revoir à chaque fois qu’on l’écrit sur l ordonnance, on doit réfléchir. Est ce que la balance bénéfice risque, elle est bonne? Est ce qu’il y a des examens à faire? Est ce que le fait qu’il ait telle pathologie implique un suivi particulier? Est ce que le patient est à jour de ce suivi? Donc il y a toute une démarche derrière qui autrefois, alors il y avait moins de maladies chroniques, il y avait euh… Les gens allaient volontiers se faire suivre à l’époque, quand il y avait pléthore de médecins par les spécialistes, et donc c’était les cardiologues qui suivaient toute l’hypertension, c’était voilà, Donc ça, on est content, ça change parce que ce n’était pas toujours, c’était même pas nécessaire, mais et en vrai, ben nous ça nous rajoute du travail et et puis en fait, maintenant comme les gens, toujours pareil, on court tous après le temps donc les gens ont pas le temps d’aller voir le médecin, ils prennent pas le temps et donc ils gardent et quand ils viennent ou déballent tout ce qui va pas et et quand on dit ben non, pour ça faudra revenir. Là les gens nous regardent comme si on était les pires, les pires commerçants du monde intéressés juste par l’argent et donc c’est un peu euh… Voilà, ça c’est un peu des désagréables. Donc voilà. Et moi ce que j’ai déjà écrit aussi comme remarques, c’est oui mais vous vous segmenter les gens. Moi mon naturopathe, il regarde tout, il fait une médecine holistique. Voilà, il les garde 1 h. Voilà. Ben non, nous c’est clair qu’on ne peut pas tout régler en 1 h, même si moi ça me dérangerait pas. Mais actuellement c’est pas dans notre système. D’une part à 25 € la consultation et puis d’autre part avec le trop de gens à voir, c’est pas possible quoi. Et les gens le comprennent vraiment. Pas spontanément quoi.

00:42:22

Sébastien : Et donc je reviens sur un de tes propos, mais donc ça veut dire que quand je vais chez mon médecin généraliste et que j’attends 1 h 30, 2 h parce qu’il est en retard, c’est pas parce qu’il est mal organisé ou parce qu’il a pris un peu plus de temps de pause que prévu. C’est vraiment parce que il y a eu ce genre de problématiques qui ont fait doubler une consultation à 20 minutes en fait.

00:42:41

Céline : Voilà. Alors ça c’est vrai. Par contre, là où je trouve que si c’est toujours 1 h et demie, 2 h, et bien c’est quand même un problème d’organisation prolixe. C’est à dire que bien on doit, c’est à nous de dire à nos patients ben non, pour ça vous reviendrez, que vous soyez contents ou pas contents. Moi je ne vais pas pénaliser les gens derrière vous. Je soigne l’urgence. Voilà. Mais pour les motifs non urgents, il faudra revenir là ou ça peut être aussi un problème d’organisation, c’est qu’effectivement on a beaucoup de médecins qui sont restés sur quinze minutes parce que voilà, sinon y mettre enfin ça les patients s’en rendent peut être pas toujours compte, mais en fait mettre des créneaux à 20 minutes au lieu de quinze minutes, ben ça nous fait perdre 30 % de rémunération. On voit, on voit… on voit trois patients par heure au lieu de au lieu de quatre et et en fait, c’est un vrai acte militant de dire ben non, moi je veux faire de la bonne médecine, et, et… Et tant pis pour, tant pis pour pour la rentabilité. Mais c’est vrai que les patients ne sont pas du tout reconnaissants de ça. Je n’ai jamais un patient qui m’a dit Ah, merci de mettre à 20 minutes! Et au contraire, ils viennent en ayant toujours plus de raisons et en disant ah ben moi quand je viens, c’est pas pour rien ou je ne vais pas vous déranger pour ça. En fait, des fois on aimerait dire ben si quoi, si vous avez un petit motif de temps en temps, venez pour ça. Parce que nous, ça, nous, ça nous permet d’équilibrer notre journée et et voilà. Mais c’est compliqué parce que c’est un peu tabou de parler, de parler d’argent, de parler de rémunération. On est censé faire ce métier pour la vocation. Donc effectivement, moi j’adore son métier, ce métier, il n’y a pas, il n’y a pas de soucis. Mais à force de compter sur la vocation des médecins, en fait on a des médecins qui qui arrêtent quoi et qui pour pas, pour pas faire ça, se tournent vers tous les exercices particuliers qui existent. Donc ça va être acupuncture, médecine du sport, médecine esthétique, enfin voilà tout, tout ce qui ne sera pas de tout ce qui ne sera pas de la médecine générale, qui partent vers la médecine salariée aussi, comme il y a du, il y a du travail pour tout le monde, qu’il n’y a pas assez de médecins. On a vraiment le choix dans le choix du mode d’exercice quoi. Et ça fait que voilà pour les gens qui nous écoutent, si vous avez du mal à trouver un généraliste, c’est entre autres, c’est entre autres pour ça quoi.

00:45:04

Sébastien : Et bien merci Céline, Merci de nous avoir donné un peu de ton temps pour nous aider à mieux comprendre ce sujet. L’objectif de cette interview pour moi, c’était de de montrer surtout que vous vous battez pour un meilleur système de santé, plus efficace pour notre santé à nous aussi et que simplement de manière égocentrée pour vos. Pour vos revenus quoi. Et puis il est clair aussi que vos conditions de travail influencent les conditions de travail des personnels hospitaliers. L’inverse est vrai aussi d’ailleurs je pense. Et que ce soit les médecins hospitaliers, les médecins libéraux ou nous les patients, finalement on est tous dans le même bateau quand il s’agit de santé.

00:45:40

Céline : Oui, tout à fait. Merci à toi de m’avoir donner la parole.

00:45:43

Sébastien : Il n’y a pas de quoi. Je te laisse le mot de la fin. Est ce que…. tu es membre du collectif No FakeMed. Est ce que peut être tu veux en dire un mot pour Pour terminer.

00:45:53

Céline : Oui, via le collectif No FakeMed. C’est un collectif qui s’était fait connaître il y a quelques années parce qu’il avait juste relayé les les données de la science en disant que certaines pathologies, certaines façons de traiter devraient plus être utilisées par les médecins parce qu’on sait maintenant qu’elles ne marchent pas. Donc c’était le cas notamment de l’homéopathie, mais il y en a d’autres. En fait, il y a l’ostéopathie, il y a l’acupuncture, il y a la mésothérapie, enfin tout un tas de pratiques qui ne font pas la preuve au niveau scientifique de leur efficacité quand on les test de manière rigoureuse dans des méta analyses et tout ça, bah ça ne marche pas mieux que le placebo. Et donc nous on estime que les médecins ne doivent pas se faire les promoteurs de ces pratiques parce que quand vous patients, vous allez voir un médecin, vous voulez savoir ce qui est prouvé quoi et pas savoir en quoi ils croient. Voilà. Et d’ailleurs, quand vous allez voir un médecin, vous pensez qu’il va vous donner un traitement prouvé par la science. Donc voilà, on aimerait que la médecine soit de plus en plus rigoureuse au bénéfice, au bénéfice des patients et et au bénéfice des patients. Donc si vous voulez jeter un oeil collectif No FakeMed. Ce doit être fakemédecine.org le site et et on cite dessus toutes les pratiques un petit peu de ce qu’on appelle médecines alternatives et complémentaires, on vous met les études, on vous met tout le débunk, tout, tout ce qui montre qu’en vrai ça ne marche pas. Et quand on essaye de vous faire croire à des choses, le médecin souvent il y croit ou le praticien y croit. Mais. Mais en fait, quand on regarde au niveau scientifique, on a des études qui montrent que ça ne marche pas. Quoi donc… Donc voilà, si vous voulez vous informer sur ce qu’on vous propose, le site est là pour ça.

00:47:37

Sébastien : Merci Céline, Bonne journée.

00:47:38

Céline : Je t’en prie. Bonne journée.

00:47:40

Sound Design : Musique Jungle

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