EP36 : Les légendes sur le massage cardiaque

Les légendes sur le massage cardiaque

EP36 - Le massage cardiaque

Bonjour, et bienvenue sur le podcast santé et sécurité.

Vous l’avez compris, cet été nous vous faisons quelques petites capsules sonores pour vous parler premiers secours.

Il ne s’agit évidemment pas de faire ici une formation ou même une sensibilisation aux premiers secours.

Il s’agit juste de répondre à certaines questions qui reviennent fréquemment lorsqu’on anime des formations aux premiers secours.

Ces capsules s’adressent donc à vous qui êtes déjà formés ou sensibilisés aux premiers secours, mais aussi à vous qui êtes simplement curieux.

D’ailleurs, petit message aux secouristes qui nous écoutent, que vous soyez formé PSC1 ou SST, dites nous en commentaire si ça vous intéresserait que l’on fasse des épisodes rappelant les différentes conduites à tenir du secouriste? 

Encore une fois, l’idée ne serait pas de délivrer une formation au travers du podcast, mais juste d’avoir dans ses oreilles un petit rappel, et permettre de se remémorer ce qu’on a appris en formation.

Du coup le sujet du jour.

Dans ce podcast je vous propose de parler massage cardiaque.

Petite précision, cet épisode est enregistré en Juin 2023.

On a choisi ce thème parce que on entend beaucoup trop de légendes urbaines sur le massage cardiaque. Certaines de ces légendes sont vraies. Mais elles ont tellement été mal amenées, et mal expliquées, que in finé ces légendes elles font peur, et deviennent contre productives : elles font peur pour certaines, et peuvent dissuader un sauveteur improvisé de débuter les gestes qui sauvent.

Mais quelle catastrophe !!!

Qui n’a jamais entendu : oulalala attention si tu n’as pas bien pris le poul de la victime et que son coeur bat encore, tu vas le tuer si tu lui fais un massage cardiaque ?

Ou encore… ah oui mais attention un massage cardiaque c’est très très technique. Et si vous le faites mal vous allez casser des côtes et c’est très grave. Vous risquez même d’aller en prison…

Et bla bla bla.

Et je pourrais aussi parler du bouche à bouche. Tantôt on entend que c’est inutile et ça ne sert à rien, tantôt on entend complètement l’inverse, que les insufflations sont indispensables et obligatoires.

Ce qui me fâche, c’est que souvent, ces propos sont carrément tenus par des formateurs en premiers secours.

Alors essayons de remettre l’église au milieu du village comme on dit, et essayons de dédramatiser tout cela.

Dans cet épisode on va répondre aux questions suivantes : 

Est ce que c’est grave de faire un massage cardiaque à une personne dont le cœur bat encore?

Est ce qu’on casse des côtes quand on réalise une réanimation cardio-pulmonaire?

Faut-il absolument pratiquer le bouche à bouche lors d’une réanimation cardio-pulmonaire?

Avant de répondre à ces questions, comme on aime bien le faire sur le podcast, un peu d’histoire et quelques chiffres.

Si ça vous intéresse d’en savoir davantage sur l’histoire de la réanimation cardio-pulmonaire, je vous invite à vous rendre p143  du livre “Le Cahier de Notes d’Alex” de notre copine Alexia DEDIEU. Elle nous y donne quelques dates clés, et quelques statistiques sur la réanimation.

Comment ca je fais encore de la pub du  livre d’Alexia ? 

Bon je l’avoue et je plaide coupable. Aucun partenariat entre nous, c’est juste qu’on aime beaucoup trop le cahier de notes d’Alex. Et les informations qu’elle nous livre, match plutôt bien avec nos thèmes du moment.

Parenthèse fermée, revenons-en à nos chiffres.

En mars 2021 la Fédération Française de Cardiologie a sorti les résultats d’un sondage réalisé par l’IFOP à sa demande.

Dans ce sondage, on apprend que 63% des répondants pensent que pratiquer un massage cardiaque sur une personne qui n’est pas victime d’un arrêt cardiaque peut être dangereux.

61% ont la crainte de ne pas pratiquer correctement le massage cardiaque.

44% des répondants pensent qu’il faut une formation pour utiliser un défibrillateur.

En France, environ 50 000 personnes par an décèdent à la suite d’un arrêt cardiaque.

Enfin il n’y aurait que 40% des français formés aux premiers secours.

Alors est-ce pour toutes ces raisons que le taux de survie à l’arrêt cardiaque en France est globalement à moins de 10% ?

Voilà pourquoi cet épisode. Je vais sûrement spoiler ce podcast, mais tant pis.

Il vaut mieux mal faire un geste qui sauve, que de ne rien faire du tout. Et pour notre sujet, il vaut mieux un massage cardiaque mal exécuté, que pas de massage du tout.

Est ce que c’est grave de faire un massage cardiaque à une personne dont le cœur bat encore?

Et bien la réponse est non ! Masser un cœur qui bat n’aura pas comme effet de l’arrêter.

Et ce n’est pas en faisant un massage cardiaque qu’on aggrave la situation, même s’il est mal exécuté. C’est en ne faisant rien que l’on va aggraver la situation.

N’oubliez pas ce chiffre : une victime en arrêt cardiaque peut perdre jusqu’à 10% de son activité cérébrale par minute si aucune réanimation n’est entreprise.

En France les secours interviennent en 15 minutes environ. Faites le calcul…

Est ce qu’on casse des côtes quand on réalise une réanimation cardio-pulmonaire?

La réponse est : ça peut arriver.

Il peut arriver qu’un massage cardiaque fracture des côtes ou la disjonction sterno-costale.

Mais. Cela n’arrive pas si fréquemment, et c’est davantage chez les sujets âgés.

Ensuite, vous ne vous en rendrez pas compte et la victime non plus. A moins d’être un super héros et d’être doté d’un appareil de radiologie à la place des yeux.

Et enfin, si demain vous faites un arrêt cardiaque, que préférez-vous ? Que je vous laisse mourir, ou que je pratique un massage cardiaque qui vous sauvera probablement la vie, en ayant comme séquelle une côte cassée?

Perso, c’est tout vu !

Ce que je vous dis là, je ne l’invente pas. Ça provient d’une étude présentée en août 2020 au congrès de la Société Européenne de Cardiologie.

Je vous mets le lien de l’étude dans la description du podcast.

Cette étude confirme qu’une réanimation peut provoquer des fractures des côtes et du sternum.

Elle dit même que le nombre de blessures provoqué par la réanimation a augmenté ces dernières années, mais qu’en parallèle, le taux de survie a lui aussi augmenté, et même que  le taux de séquelles neurologiques des victimes ayant survécu à un arrêt cardiaque à diminué.

Les conclusions de cette étude sont donc très claires : oui on peut casser des côtes, mais ce n’est pas grave, car la réanimation augmente les chances de survie, et diminue les séquelles cérébrales considérablement.

CQFD

Bref, en cas d’arrêt cardiaque, appeler, masser et défibriller sans vous poser de questions. 

Et pour les procéduriers qui craignent d’être attaqués en justice pour avoir sauvé une vie mais cassé une côte, la loi du 3 juillet 2020 a instauré le statut de citoyen sauveteur. Lorsque vous pratiquez les gestes qui sauvent, vous devenez citoyen sauveteur, et vous vous êtes alors exonéré de toute responsabilité civile.

Faut-il absolument pratiquer le bouche à bouche lors d’une réanimation cardio-pulmonaire?

On a parfois entendu que le bouche à bouche n’était pas recommandé, parce que trop de perte de temps par rapport à l’absence de compression thoracique pendant qu’on insuffle.

On a aussi entendu que le massage cardiaque crée une dépression permettant de mobiliser l’air et donc de permettre une respiration artificielle.

Ces messages viennent de plusieurs études américaines de l’Américan Heart Association ou encore de l’American College of Cardiology.

Cependant, en Europe, le Conseil de Réanimation Européen a jugé que ces études ne peuvent pas prouver l’efficacité de l’arrêt des insufflations dans la réanimation.

C’est pourquoi, en France, tous les référentiels de premiers secours recommandent la pratique du bouche à bouche.

Toutefois, pour être efficace, il faut que le délai entre le massage cardiaque et le bouche à bouche soit le plus court possible, et idéalement que ce délai n’excède pas 5 secondes.

5 secondes c’est également le temps maximum que l’on a pour réaliser ces insufflations.

Il y a cependant quelques cas ou nos référentiels français précisent que les insufflations peuvent ne pas être effectuées:

en cas de répulsion, de COVID19, de vomissement ou de traumatisme majeur de la face.

Voilà cet épisode est terminé, j’espère qu’on aura réussi à dédramatiser la réanimation cardio-pulmonaire.

N’oubliez pas : mieux vaut un geste qui sauve mal réalisé, que pas de geste du tout !

Dernière précision : je rappelle que cet épisode est enregistré et diffusé en Juin 2023.

La pratique du secourisme, c’est une somme de recommandations et de techniques issues d’études scientifiques et médicales.

Et ces recommandations, qui sont vraies aujourd’hui, bougeront peut-être dans le temps suivant les études futures qui seront publiées.

Et c’est pour ces mêmes raisons, que le secourisme change si souvent 😉

Il faudrait d’ailleurs qu’on réfléchisse à faire un épisode pour expliquer le mécanisme des référentiels de premiers secours, et pourquoi ça change si souvent.

Allez sur ce,

Si vous avez aimé cet épisode, n’oubliez pas de mettre des étoiles et des cœurs sur votre appli de podcast, ça nous fera super plaisir, et ça nous aidera beaucoup.

Soyez acteur de votre santé et de votre sécurité, et surtout prenez soin de vous 🙂

Ressources : 

Résultats de l’Observatoire du cœur des Français Fédération Française de Cardiologie (Enquête Ifop) :

https://www.fedecardio.org/wp-content/uploads/2021/09/FFC_OBSERVATOIRE-DU-COEUR_GESTES_QUI_SAUVENT.pdf

Etude présentée au Congrès de la Société Européenne de Cardiologie en 2020 : Les compressions thoraciques profondes préviennent les lésions cérébrales en cas d’arrêt cardiaque

https://www.escardio.org/The-ESC/Press-Office/Press-releases/Deep-chest-compressions-prevent-brain-damage-during-cardiac-arrest

Loi du 3 Juillet 2020 sur le CItoyen Sauveteur :

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000042079128

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